« Dénazification et décommunisation. Deux politiques d’épuration ? »

(Résumé du chapitre)

La R.F.A. a connu deux politiques d’épuration, ce qui constitue une expérience très rare. Pourtant, presque aucune recherche n’a tenté de comparer les politiques de dénazification et de décommunisation menées par la RFA. Comme toute autre policy, les politiques d’épuration sont une action étatique et ont, à ce titre, vocation à produire un mode d’organisation autant qu’une vision du monde. Cependant, elles peuvent comporter des mesures ou reposer sur des logiques qui sont en décalage partiel avec leur esprit général. Distinguer la logique de l’épuration de celle de la punition s’avère alors heuristique. Tandis que le schéma du droit pénal repose sur la conception morale que toute faute commise doit être expiée, les politiques d’épuration apparaissent comme un instrument de pouvoir politique en vue de l’établissement d’une nouvelle couche dirigeante.
Qu’il s’agisse de la phase d’élaboration ou de la phase de mise en œuvre, les politiques de dénazification et de décommunisation révèlent tantôt des similarités tantôt des différences. Le contexte historique est le facteur le plus ambivalent. Alors que les deux politiques sont apparues dans une période de transition démocratique, il s’agissait dans le premier cas de la conséquence d’un conflit militaire et dans le second cas d’une fusion d’États ce qui explique la différence dans les sanctions appliquées. Par ailleurs, si la dénazification avança par tâtonnements, la décommunisation a bénéficié d’un cadre étatique plus stabilisé, du précédent de 1945 et, surtout, de la tradition séculaire de la sélection politique sur la base de l’obligation de loyauté. En revanche, les liens de filiation entre dénazification et décommunisation apparaissent très fortement dans la phase de mise en application (procédures de recueil d’information et esprit d’investigation). Au total, la comparaison entre ces deux politiques fait apparaître la décommunisation comme une politique hybride, relevant par certains aspects, et non des moindres, d’une politique d’épuration et par d’autres du registre (traditionnel dans l’histoire de la fonction publique allemande) de la sélection politique.